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Lecture Analytique

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? Le plaisir du palimpseste parodique : une réécriture de Lorenzaccio de Musset et de

Gargantua de Rabelais

I. QUOI ? La reprise du canevas de la scène de conjuration politique

souvent présente dans le drame romantique à caractère historique (comme

dans Lorenzaccio de Musset)

a) Le « festin des conjurés »

Reprise d'un topos2 du drame romantique : réunion autour d'un repas des futurs acteurs de la conjuration

1 Conjuration : projet de prise de pouvoir politique par la force, la violence.

2 Topos : mot grec signifiant littéralement « lieu » ; aujourd'hui synonyme de « lieu commun » ou de « cliché »,

renvoyant en littérature à des motifs ou à des thèmes récurrents et attendus à force d'être repris et imités.

politique, autour d'un leader, ici Père Ubu.

b) La confidence à un allié politique

L'instigateur de la conjuration, Ubu, se confie au capitaine Bordure, qui prend son rôle très au sérieux, et de

manière très noble, très digne (cf. lignes 12-13 page 29 éditions « Petits classiques » Larousse : « S'il s'agit

de tuer Venceslas, j'en suis. Je suis son mortel ennemi et je réponds de mes hommes. »).

II.COMMENT ? « Les mots en bouche » : l'association du plaisir

de la « grande bouffe » et du plaisir des mots

a) Une débauche de nourriture et d'obscénité scatologique

Défilé des plats pas forcément très ragoûtants : cf. lignes 14-18 scène 1 : Mère Ubu : « Soupe polonaise,

côtes de rastron, veau, poulet, pâté de chien, croupion de dinde, charlotte russe... / Père Ubu : Eh ! En voilà

assez je suppose. Y en a-t-il encore ? / Mère Ubu, continuant : Bombe, salade, fruits, dessert, bouilli,

topinambours, choux-fleurs à la merdre. » (figure de style employée par Jarry : l'accumulation ou

l'énumération).

La « merdre », juron favori de Père Ubu, devient aliment... Ubu offre même à ses invités de goûter à son

« balai innommable » (l. 34, sc 3), c'est-à-dire au balai servant à récurer les toilettes, désigné par une

périphrase grandiloquente et ironique3.

L'ironie est de nouveau de mise quand les invités félicitent Mère Ubu pour son repas : « Exquis, exquis !

Vive la mère Ubu ! » (l. 32, sc 3), alors qu'il est plutôt dégoûtant.

Ironie aussi au début de la scène 4 : « Père Ubu : Eh bien, capitaine, avez-vous bien dîné ? / Capitaine

Bordure : Fort bien, monsieur, sauf la merdre. / Père Ubu : Eh ! La merdre n'était pas mauvaise. » (l. 1-3

page 28).

b) La débauche de mots

- Création lexicale (néologismes) : « rastron », « merdre ».

- Expressions typiques de Père Ubu : « sapristi, de par ma chandelle verte » (l. 5, sc 3), « bougre » (l. 24, sc

3) (l. 11, sc 4), « merdre, merdre, merdre ».

- Un chapelet d'injures, de jurons, de menaces, lancé entre les différents personnages, mais surtout entre

Mère et Père Ubu : « Tas d'Arabes » (l. 26, sc 3), « misérable » (l. 35, sc 3), « traître et gueux voyou » (l. 50,

sc 3), « gueux » (l. 7, sc 4), « je vais te marcher sur les pieds » (l. 20, sc 4), « grosse merdre ! » (l. 21, sc 4),

« je jure sur la Mère Ubu... » (l. 23, sc 4).

- Expression finale très ironique : Père Ubu appelant Mère Ubu « ma douce enfant » (l. 25, sc 4).

3 Ironie : 1) Procédé rhétorique reposant sur un dédoublement énonciatif : le locuteur avance un énoncé tout en

indiquant ou en sous-entendant qu'il ne l'assume pas. 2) Théâtralisation de la parole. 3) Humour noir teinté de

cynisme.

III. POURQUOI ? Le plaisir du palimpseste parodique : une

réécriture de Lorenzaccio de Musset et de Gargantua de Rabelais

a) La parodie de Lorenzaccio de Musset

Les conjurés ne prennent pas au sérieux le leader, qui lui-même est un bouffon : les invités ne pensent qu'à

manger, et en plus se plaignent (l. 42 et suivantes, sc 3). Ils sont insultés par la maîtresse de maison (« tas

d'Arabes »), et empoisonnés par leur hôte, père Ubu (l. 37, sc 3). L'hôte chasse ses invités comme des malpropres,

comme le ferait un personnage de farce (l. 40-49, sc 3). > Volonté non-réaliste, scène nonvraisemblable.

Le canevas politique de conjuration n'est qu'un prétexte à la parodie de la « scène de genre », bien connue

par Jarry, fin connaisseur de l'histoire littéraire.

De même, à la scène 4, le secret et la relation de confiance qui devrait se lier entre les deux conspirateurs

sont annulés par la parodie et la dérision : ils parlent d'abord de ce qu'ils ont mangé (l. 1-4) ; quand Bordure,

très digne, seul personnage qui pourrait faire partie réellement d'un drame romantique, assure son soutien à

Père Ubu, celui-ci se jette dans ses bras comme un petit garçon à qui on aurait passé un caprice : « Oh ! Oh !

Je vous aime beaucoup, Bordure » (l. 14-15). Le sujet politique est tout de suite abandonné, comme étant une

affaire réglée, pour laisser place tout de suite à la puanteur de Père Ubu qui ne se lave jamais !

> Parodie passant par le mélange des registres (comique, farcesque pour Père et Mère Ubu / tragique, noble

...

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