Vaut-il mieux vivre heureux dans l'illusion ou malheureux dans la vérité ?

Un des buts premiers de l’être humain est bien sûr de survivre, mais aussi d’être le plus heureux possible. Afin d’y parvenir, certaines personnes préfèrent rester dans l’illusion plutôt que de regarder la vérité en face puisque cette même vérité risquerait de faire leur malheur. La quête de la vérité est le but même de la philosophie. Le Vrai constitue pour Platon une valeur absolue. Atteindre la vérité suppose des critères pour la séparer de ce qui n’est pas elle. Lorsque la vérité se reconnaît d’elle-même, ce critère est l’évidence. Mais souvent la vérité est cachée. Dès lors, si elle n’est pas révélée comme dans la religion, elle doit être démontrée. Le scepticisme considère, lui, qu’elle est inaccessible. La vérité s’oppose à l’erreur et à l’illusion. L’illusion compromet la recherche de la vérité en philosophie. L’illusion est la confusion de deux plans, celui de la subjectivité et de l’objectivité. L’illusion est une projection de notre subjectivité. L’illusion nous réconforte et nous apaise, elle « nous arrange » et, si la vérité est parfois difficile à accepter, sa fonction est de nous rassurer, de compenser nos frustrations et de donner une sorte de réponse à nos désirs. Si l’illusion peut nous rendre heureux, alors pourquoi choisir la vérité si celle-ci nous rend triste ? Ou bien, Faut-il au contraire toujours considérer que la vérité est préférable à toute forme d’illusion même si elle nous attriste ou nous déçoit ?

Aux premiers abords, il est possible de préférer l’illusion à la vérité. L’illusion peut être considérée comme un désir. Or l’illusion est souvent définie par le fait de prendre ses désirs pour des réalités. L'illusion est alors utilisé lorsque l'on veut changer la réalité. C'est le faire de croire en quelque chose qui ne s'est pas passé, qui est irréel. Elle est là pour nous rassurer, nous donner plus envie de vivre dans le monde et faire face au problème de la réalité. C'est une croyance qui peut cacher un double jeu : le fait de croire en l’illusion et celui d'être trompé dans d'autres cas. Prenons une jeune fille qui a le cancer et qui n’a qu’une très mince chance de s’en sortir. Elle va mourir, mais malgré cela, la jeune fille s’accroche à l’illusion qu’elle va s’en sortir. La question qui se pose maintenant est : est-ce que l’illusion qui réconforte est préférable à la vérité qui dérange? Il est clair que si la jeune fille se berce d’illusion et est persuadée qu’elle va s’en sortir, elle sera plus heureuse. Mais l’illusion n’est-elle pas réconfortante seulement le temps de sa durée ? Or elle n’est pas éternelle. Aussi, lorsqu’elle se dissipe, la réalité n’en apparaît-elle pas d’autant plus cruelle ? La vérité ne risque-t-elle pas de déranger davantage, voire d’inquiéter ou d’être insupportable ?

     L’illusion permet la découverte de l'irréel, du supposé inaccessible, qui devient accessible par la force de l’illusion. « L'homme crée seulement quand il aime, quand il baigne dans l'illusion de l'amour, c'est à dire, quand il croit de façon inconditionnelle à quelque chose de juste et de parfait. » (Nietzsche, Seconde considération intempestive) Christoph colomb n’a t-il pas en 1494, découvert l'Amérique grâce à une illusion ? En pensant rejoindre l’Inde, il a atterri en Amérique. Il croyait de façon inconditionnelle qu’il allait rejoindre l’inde par l'océan atlantique. Mais elle permet aussi le progrès technique, par la croyance dans la réussite possible de nos actions

Mais n’est-il pas préférable de choisir la vérité pour s’éviter des désillusions cruelles ou douloureuses ? Tout d’abord la vérité qui dérange est préférable, car elle est fondée sur la raison. La raison a rendu possible l’apparition des sciences et de la démocratie. Deux domaines qui nous sont aujourd’hui essentiels, et qui utilisent la vérité comme pilier central. Nous pouvons donc en déduire que la démarche rationnelle est la meilleure façon de nous approcher de la vérité. Les illusions ne font que nous donner de fausses idées dans l’espoir de nous rendre plus heureux, mais le « bonheur » ressenti n’est que provisoire, car malheureusement, la vérité finit toujours par nous rattraper. La raison traite toute croyance comme fausseté potentielle, car elle refuse de se soumettre à des idées sans les remettre en question. C’est ce processus même qui permet d’atteindre la vérité et à partir de cette même vérité, le bonheur par la sagesse. Il est bien plus facile de se bercer d’illusion, mais le bonheur qui s’en suit est fictif et éphémère.

     Puis le choix du vrai est la condition de toute liberté émotive. L'illusion personnelle peut nous absorber totalement et nous faire perdre toute liberté. Par exemple la paranoïa est une forme d'illusion. La personne qui a tendance à avoir l'illusion d'être persécuté ou d'avoir une opinion pessimiste sur tout. La personne qui à tendance à imaginer le pire. Dans le cas de cette illusion personnel, la vérité est là pour se rassurer. Par exemple, croire aux fantômes peut être symbole d'illusion, on a peur de l'inconnu mais si la vérité apparaît alors elle nous réconforte et fait disparaître notre peur. la vérité dans ce cas, permet à la personne d'être libre émotivement.

Par ailleurs, peut-on vraiment parler de choix entre illusion et vérité ? Tout d’abord la vérité n’est pas forcément synonyme de malheur et l’illusion de bonheur. Le film “the truman show” de Peter Weir en témoigne. La scène finale de The Truman Show est très intéressante, et révèle la question centrale du film : enfin arrivé au bout du monde avec son petit bateau, se cognant au décor qui sert de ciel dans ce monde artificiel, Truman découvre que tout n’est qu’illusion. Et là, le producteur tente de le convaincre de rester, en lui disant que le monde extérieur n’est pas plus beau, ni plus heureux que son monde illusoire – ce qui est sans doute vrai. Que va choisir Truman ? il va choisir la vérité au risque d’être malheureux, mais il sera surement plus heureux que dans sa vie illusoire qui n’aura plus de sens. Truman ne veux pas vivre dans un monde où il est prisonnier et préfère voir le monde réel. Le problème est là : faut-il dénoncer l’illusion ? Pourquoi préférer la vérité ? Car nous sommes nous-mêmes tiraillés entre deux sentiments : d’une part, nous voulons tous être heureux, comme le remarquent les philosophes. Le bonheur semble être le principal but de la vie. Si c’est le cas, peu importe que ce bonheur soit « illusoire », car après tout, le bonheur n’est rien qu’un sentiment. D’ailleurs, l’idée même que notre bonheur puisse être une « illusion » n’est pas évidente : quelle différence en un vrai bonheur et un « faux » bonheur si, de toute façon, on se sent heureux ? Et pourtant, si on nous demande de choisir, on préfèrera sans doute la vérité : on est forcément horrifié par l’idée d’être « prisonnier » d’un monde illusoire.

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