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Relations Internationales

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estissement des connaissances acquises dans la présentation générale (6 ou 7 séances). A l’issue de ces deux premiers volets de 13 séances, nous mettrons en place un planning d’explications avec lecture et traduction d’extraits précis. Nous prendrons un extrait que nous lirons et traduirons et ensuite nous en ferons le commentaire (3 séances après les résultats d’admissibilité). Donc en ce jour anniversaire de la victoire d’Austerlitz, il nous faut commencer à commenter ensemble De la guerre de Clausewitz. Ce texte que nous avons à expliquer est l’écrit d’un général prussien, écrit inachevé, écrit par endroit constitué de simples notes fragmentaires, écrit ou pas un seul nom de philosophe ni de poète n’est cité, écrit tout entier tourné vers l’idée qu’il ne doit pas y « avoir de limites à la violence », pour reprendre une phrase du paragraphe 3 du chapitre 1, écrit qui, durant la grande guerre, inspira tant d’état major, provoquant sans doute tant de morts, écrit que Hitler voulait voir figurer dans la cantine de chaque soldat qui partait massacrer à l’Est, écrit, en un mot que le jury de l’agrégation de philosophie a chargé de représenter la philosophie allemande comme Strawson incarne l’anglaise, Platon la grecque. Comment interpréter ce choix, sachant, et vous le savez au stade où vous en êtes de vos études, que la langue allemande a produit des textes de philosophie non négligeables telle la Critique de la raison pure d’un certain E. Kant, la Phénoménologie de l’esprit d’un dénommé Hegel, ou encore les Ideen , de celui qui fut et restera sans doute le plus grand des allemands ? Comment dès lors

comprendre ? Faut-il y lire un anti-germanisme primaire de la part du jury ? Une volonté de déconsidérer la philosophie allemande en mettant en avant ce qu’elle peut avoir de moins philosophique et de plus allemand ? Faut-il imaginer que dans la guerre des paradigmes, l’un continental, l’autre anglo-saxon, le jury ait voulu définitivement donner l’avantage à la langue anglaise ? Ou bien faut-il sourire de voir combien, subrepticement, sourdement, inconsciemment, ressurgissent les stéréotypes nationaux par ce choix des titres et des auteurs. Là où les anglais parlent des individus (tel est le titre du texte de Strawson que vos camarades anglicistes ont à commenter), donc là où les anglais parlent des individus, les allemands parlent de la guerre ! S’il y avait eu un texte en langue française, aurait-on vu imposer « De l’amour » de Stendhal ? Le français frivole parle de l’amour, l’anglais pragmatique défend l’individu, l’allemand lui pense à la guerre ; il la pense et il la fait puisque, je vous l’ai dit, ce texte que nous avons à commenter a pour auteur un général qui servit l’armée prussienne de 1792 à 1811, l’armée russe de 1812 à 1814, puis la Prusse à nouveau jusqu’à sa mort en 1831. A cette question : pourquoi ce texte plutôt qu’un autre, je n’ai pas de réponses et sans doute ne saurons nous jamais si ce qui présida au choix du jury fut une volonté de nature philosophique ou le seul hasard, qui en règle général l’est beaucoup moins. Quoiqu’il en soit, je commencerai dans ce cours par esquisser les raisons que nous pourrions avoir de ne pas aimer ce texte pour mieux les déconstruire ensuite, puisque ce texte doit être commenté par vous, il vous faut donc l’aimer, (vous n’avez pas d’autre choix), et pour l’aimer il vous faut lui trouver un intérêt philosophique, forcément philosophique. Je vous aiderai donc dans cette « drôle de tâche », et procéderai pour cette présentation générale (premier des 3 grands volets) en trois points : I) Les raisons de ne pas considérer ce texte comme un texte philosophique

II) Déconstruction de ces raisons III) Les enjeux philosophiques du texte : la raison, la métaphysique et la mort

I ) Les raisons de ne pas considérer ce texte comme un texte philosophique ou : Des préjugés qui en empêchent l’accès Ces raisons sont autant de premières approches de la biographie de l’auteur, et du contenu superficiel de son livre. Les raisons de l’aimer seront, en revanche, des approches du contexte historique de l’époque et du contenu philosophique plus précis du texte. A) Un militaire borné

Dans un premier temps, donc la consternation ne peut être que totale puisque ce texte peut paraître incarner le moment précis où la pensée allemande n’est plus philosophie mais devient allemande, c’est-à-dire le moment précis où naissent les nationalismes, ce moment ou l’on peut dire, si nous commençons à utiliser subrepticement les catégories de Clausewitz, que nous assistons à une montée progressive aux extrêmes, « poussée aux extrémités » qui conduit à la guerre absolue, c’est-à-dire à un mouvement de violence pure qui visera tout d’abord la soumission de la volonté de l’ennemi (paragraphe 2, chptre 1, livre 1) et donc à son désarmement (paragraphe 4) voire, la destruction physique de l’adversaire, cela dans un emballement qui sera celui des nationalismes mais pas celui de la pensée de Clausewitz. Pour Clausewitz l’objectif idéal de la guerre est l’anéantissement des forces armées de l’ennemi. On reviendra sue ce point et sa distinction d’avec l’idée d’une destruction physique de l’adversaire. Donc Clausewitz est un patriote et un patriote prussien. Ce militaire qui, je vous le disais, servit dans l’armée de Prusse puis dans l’armée Russe de 1812 à 1814, et devint, à partir de 1815, instructeur des armées, ce militaire donc est l’ennemi juré en même temps que l’admirateur farouche de Napoléon et donc de la France. C’est un militaire qui, nous disent ces biographes, reçut une

éducation quelconque, voire bornée (point a). Vous n’avez pas affaire à ce cas classique de militaires issues de la grande noblesse, cas que vous trouvez illustrés dans la Recherche du temps perdu de Proust ou encore dans la Grande illusion de J. Renoir. Dans ce film, souvenez vous, vous avez la confrontation de quatre soldats, deux nobles : l’un allemand Von Rauffenstein, interprété par Von Stroheim, l’autre français, de Boieldieu, interprété par P. Fresnay, puis vous avez les français du peuple, un contremaître, aimable baroudeur, inénarrable Titi, du nom de Maréchal, interprété par J. Gabin et un grand banquier parisien, et donc évidemment juif, Rosenthal magnifiquement interprété par Marcel Dialo, qui jouait déjà un tendre marquis dépassé par sa gentillesse et ses amours dans la Règle du jeu. Or, dans ce film, Renoir peint admirablement la figure du militaire qui, avant d’être soldat, est un noble cultivé et raffiné, qui avant d’être de son pays est de sa caste, à savoir l’aristocratie. Von Stroheim, le colonel allemand tombe sinon amoureux, (le dire comme cela ne serait pas tout à fait adéquat) mais disons qu’il tombe en amitié forte pour le noble français ; il l’aime plus que le combat qu’il doit mener à la tête de l’armée, plus que l’issue de ce combat qui verra son pays vaincu, il l’aime parce qu’il est noble comme lui et que la classe transcende le territoire, l’aristocratie, les peuples, la confrontation entre deux hommes, celle des armées. Or, Clausewitz n’appartient pas du tout à cette figure de nobles cultivés, dilettantes et esthètes, nobles qui vont à la guerre comme on se rend à son club, c’est-à-dire avec élégance, désinvolture, voire nonchalance. Clausewitz entre à l’armée dès l’âge de 13 ans et, nous dit un de ses biographes, y reçut une éducation bornée. Je cite donc ce biographe : « le père de Clausewitz était un officier de la guerre de 7 ans imbu des préjugés de son état ; au foyer de ses parents il n’a guère rencontré que des officiers et ce n’était pas les plus cultivés ni les plus ouverts ; dés sa treizième année il devint lui-même soldat, participant aux campagnes de 1793 et 1794 contre la France et toute cette partie de son service jusqu’en 1800 ne lui permit de s’imprégner d’aucune autre opinion hormis celles qui habitaient l’armée

affirmant l’excellence et la supériorité de l’armée prussienne et de son organisation ». J’emprunte cette citation à un livre qui est en français et, qui comme le note R. Aron, n’a pas d’équivalent en allemand à savoir, M.L Steinhauser, Carl von Clausewitz , de la révolution à la restauration, écrits et lettres, Gallimard 1976. Dans ce texte, donc Marie Louise Steinhauser -qui on ne sait pourquoi s’est entiché de notre petit général- recueille l’essentiel des textes de Clausewitz antérieurs à 1815, ainsi que des fragments de la correspondance et des extraits d’écrits politiques. (La citation que je viens de vous donner et qui est un témoignage sur le milieu d’origine de Clausewitz se trouve p. 444). Cette première citation me permet de faire un point bibliographique, point d’information et de respiration. Dans ce début de cours, j’ai cité des textes littéraires et des films, et ils font partie de la bibliographie que je serai tentée de vous donner. Lisez Proust, vous y croiserez des militaires sympathiques et presque émouvants, lisez aussi Stendhal, vous y verrez des militaires pommés, lisez aussi et évidemment Tolstoï, Guerre et Paix, et achetez les DVD de la Grande illusion, celui du « Jour le plus long », où Robert Mitchum est superbe, faîtes vous offrir à Noël, un coffret sur les films de guerre, ceci pour vous mettre dans la Stimmung du militaire, appréhender son ethos et sa manière de penser ; pour la partie stratégique, car vous le verrez, il sera question de stratégie, de tactique, de

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