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L'Odeur De Pension, Balzac

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is, puis des chaufferettes misérables à trous cassés, à charnières défaites, dont le bois se carbonise. Pour expliquer combien ce mobilier est vieux, crevassé, pourri, tremblant, rongé, manchot, borgne, invalide, expirant, il faudrait en faire une description qui retarderait trop l'intérêt de cette histoire, et que les gens pressés ne pardonneraient pas.

Le Père Goriot (1835), Balzac

Éclairages

* ‘’l’office’’: pièce où l’on range la vaisselle, conserve les provisions.

* ‘’l’hospice’’ : établissement à régime hospitalier où l’on accueillie les vieillards, les incurables.

* ‘’atmosphères catarrhales’’ : remplies de sécrétions provenant des bronches des pensionnaires.

* odeur ‘’sui generis’’ : odeur si particulière qu’on ne peut pas la définir.

* ‘’ronds de moiré’’ : fer-blanc auquel on a donné des reflets brillants.

* ‘’vineuses’’ : qui à la couleur du vin rouge.

* ‘’un cartel’’ : pendule

* ‘’quinquets d’Argand’’ : lampes à huile

* ‘’facétieux externe’’ : pensionnaire qui mange à la pension, mais qui n’y dort pas.

* ‘’style’’ : poinçon utilisé dans l’Antiquité pour écrire sur des tablettes de cire.

* ‘’sparterie’’ : fibre végétale très résistante.

* ‘’chaufferettes’’ : ustensile pour se chauffer les pieds.

* Les interventions du narrateur créent un effet de complicité et font appel aux sens du lecteur. Elles se repèrent par un changement de personne et de temps, une ponctuation expressive, et une expression d’opinion.

Analyse

Balzac est l'un des plus grands écrivains français de la première moitié du XIXe siècle. Réalisateur de l'immense projet littéraire que constitue La Comédie humaine, Balzac vise à travers ses romans à décrire la société de son époque, les classes et individus qui la composent et les mentalités qui s'y développent. C'est dans cette perspective que paraît Le Père Goriot en 1835. L'extrait étudié ici est en fait l'ouverture du roman, et présente de manière brillante le réalisme balzacien puisqu’à travers une description minutieuse, l’auteur nous fait part de l’odeur de la pension de Mme Vauquer et annonce l’intrigue tragique du roman.

I] Une description réaliste d’un milieu misérable : la pension de Mme Vauquer

1) Une peinture méthodique, exhaustive et organisée

a) Une peinture méthodique et organisée

- usage d’un adjectif numéral ‘’première’’ qui implique une progression.

- usage d’indicateurs spatiaux : ‘’dans un angle’’ ; ‘’qui lui est contigüe’’.

b) Une peinture exhaustive

- description des moindres détails : énumération d’objets comme ceux reposant sur les ‘’buffets’’ : ‘’carafes’’ ; ‘’ronds de moiré’’ ; ‘’pile d’assiettes’’.

- Nombreux adjectifs qualificatifs et relatives : ‘‘chaises estropiées’’ ; ‘’charnières défaites, dont le bois se carbonise’’.

- tout est indiqué : couleur, matière première, origine de fabrication ‘’assiettes en porcelaine épaisse, à bords bleus, fabriquée à Tournai’’.

c) Une peinture anti-idéaliste

- Balzac n’idéalise pas la réalité comme les romantiques mais il reproduit les objets tels qu’ils sont.

- Il adopte une rigueur scientifique : usage des verbes inventer et évaluer, des noms procédés, quantités et atmosphère ‘’Peut-être pourrait-elle se décrire si l’on inventait un procédé pour évaluer les quantités élémentaires […] qu’y jettent les atmosphères catarrhales et sui generis de chaque pensionnaire’’.

2) Une découverte par les sens d’un lieu repoussant et laid

a) L’odorat

- caractérisation d’une odeur désagréable : ‘’pièce exhale une odeur sans nom’’ ; ‘’humide au nez’’.

-connotations péjoratives : l’énumération sous forme de rythme ternaire ‘’elle sent le renfermé, le moisi, le rance’’ se compose d’adjectifs qualificatifs dépréciatifs transformés en noms / ‘’le renfermé’’ connote le manque d’aération, ‘’le moisi’’, l’humidité et ‘’le rance’’ la mauvaise qualité de la nourriture servie.

- choix de l’italique pour ‘’l’odeur de pension’’ : Balzac généralise et donne un titre à quelque chose qu’il n’arrive pas à décrire.

b) Le toucher

- sensations tactiles de crasse et de graisse : ‘’buffets gluants’’ ; ‘’poussière se combine avec l’huile’’ ; ‘’toile cirée assez grasse’’.

c) La vue

- accumulation d’adjectifs qualifiants le mobilier : ‘’vieux’’ ; ‘’pourri’’ et personnification de celui-ci ‘’borgne’’ ; ‘’tremblant’’.

- Balzac veut nous faire découvrir un lieu misérable et pouilleux donnant une sensation de dégout.

3) Le narrateur comme guide

a) L’adresse au lecteur

- présence de la 2ème personne du pluriel / Balzac prend à partie le lecteur : ‘’vous trouveriez’’ ; ‘’vous y verriez’’.

b)

II] L’omniprésence affective et subjective du narrateur

1) Une peinture affective, poétique, caricaturale et oratoire

a)

II/ La présence du narrateur

1/ Une évocation subjective

· Quel que soit le désagrément réel de cette odeur, les procédés qui la caractérisent ont une valeur argumentative.

· Balzac a recours à plusieurs accumulations ternaires : « Elle sent le renfermé/ le moisi/ le rance », « elle donne froid/ elle est humide au nez/ elle pénètre les vêtements », « elle a le goût d’une salle où l’on a dîné, elle pue le service/ L’office/ l’hospice ».

· La répétition de « elle », la juxtaposition des caractérisations (mises en valeur par l’absence de mots de liaison) donnent à l’odeur une pénétration intense et envahissante.

· D’autre part, l’association de l’odorat aux sensations tactiles « froid », « humide », « pénètre » a une dimension hyperbolique soulignée par l’accumulation et par l’implicite. Le lecteur a lu précédemment que le foyer de la cheminée de ce salon est toujours propre car on y fait du feu que dans les grandes occasions.

· L’expression « le goût d’une salle où l’on a dîné » connote l’écoeurement provoqué par l’odeur des restes refroidis.

· « Le service, l’office, l’hospice » accentue également la violence du verbe « puer ». La récurrence du son « ice » est particulièrement dépréciative. Ce salon sent les pauvres, les domestiques, les vieux et leur odeur se mêle à celle des ragoûts à bas prix.

2/ L’énonciation et le registre ironique

· Les marques de l’énonciation et le registre ironique traduisent aussi la subjectivité du narrateur.

· Notons en particulier l’indice de personne « vous » : « Si vous le compariez...vous trouveriez ce salon... ». Pour souligner le caractère extrêmement misérable de ce rez-de-chaussée, le narrateur incite le lecteur à faire une comparaison avant de l’inviter avec lui dans la salle à manger.

· Le champ lexical du raffinement « salon », « élégant », « parfumé », « boudoir » est valorisant mais dans ce contexte son emploi est purement ironique. Le lecteur pourra aussi imaginer que ce salon immonde tient lieu de « boudoir » à mme Vauquer lorsqu’il fera sa connaissance quelques pages plus loin.

· L’exclamation « Eh bien » et l’adverbe « peut-être » sont des modalisateurs qui soulignent le dégoût et l’ironie du narrateur.

· La tonalité scientifique de la longue phrase « Peut-être pourrait-elle se décrire si l'on inventait un procédé pour évaluer les quantités élémentaires et nauséabondes qu'y jettent les atmosphères catarrhales et sui generis de chaque pensionnaire, jeune ou vieux » est humoristique. Elle connote par l’hyperbole les atmosphères catarrhales, la toux et l’haleine fétide des pensionnaires toujours enrhumés et les odeurs intimes, propres à chacun (« sui generis »).

· Enfin, le texte s’achève

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