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Littérature Française

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genre: un texte chanté - ou plutôt psalmodié - d'un seul élan sans interruption. La fragmentation du récit en laisses répond sans doute aux exigences de la récitation publique - n'oublions pas que les chansons de geste étaient chantées-psalmodiées par des jongleurs. Mais certaines modalités de disposition des laisses - enchaînées, dans lesquelles le premier vers reprend le dernier de la laisse précédente, ce qui suggère, plus que la liaison, le recommencement, ou similaires, qui reprennent un même motif ou moment narratif, avec des variations parfois infimes - donnent aux gestes leur tempo spécifique: une série d'élans successifs, saccadés plutôt qu'enchaînés, chaque nouvel élan, marqué par une nouvelle assonance, indiquant plutôt la rupture. á cela s'ajoutent la prédilection pour les phrases courtes, limitées aux dimensions du vers, le goüt pour la parataxe, qui associe les phrases comme des «blocs de pierre», pour reprendre l'heureuse formule d'E. Auerbach (Mimesis), autant d'obstacles á la fluidité de la narration. Cette manière originale de configurer la temporalité du récit, fondée sur l'absence de linéarité, jouant sur la répétition et l'écho, sur les effets de symétrie qui affectent les caractères également (Roland le preux fidèle s'oppose au traître Ganelon, de même qu'Á son «sage» ami Olivier: «Rollant est proz e Oliver est sage») est une forme de manifestation du «style formulaire». En effet, le récit épique se fonde sur le retour de certains motifs (revêtement des armes par le héros, ambassade, combat, poursuite, plainte funèbre, etc) constitués á l'aide des «formules», c'est-Á-dire de certains «noyaux lexicaux et sémantiques» (E. Baumgartner, Histoire de la Littérature Française. Moyen Âge, 1988). Ce style permettait sans doute aux jongleurs d'improviser sur un canevas donné pour pallier á des trous de mémoires. Mais il n'assigne pas moins au genre une dimension d'oralité, caractéristique essentielle du genre, á laquelle contribuent amplement les formules censées maintenir le lien avec le public du type «Oez, seignurs!», dimension subsistante même dans la forme écrite de la chanson.

LE GRAND CHANT COURTOIS (XIIe-XIIIe SIÈCLES)

Un lieu commun veut qu'á l'aube de toute littérature il y ait, á côté des poèmes épiques qui exaltent la prouesse, un lyrisme populaire, souvent «féminin», qui chante un amour simple et spontané. La littérature française fait sur ce point exception, car le lyrisme qui surgit brusquement dans les premières années du XIIe siècle au Midi de la France, en pays d'oc, n'a rien de populaire mais, au contraire, est très élaboré, raffiné, expression poétique ritualisée d'un art d'aimer propre á une élite. Le premier poète qui ait cultivé cette nouvelle forme du lyrisme Guillaume IX, duc d'Aquitaine et comte de Poitiers (1071-1127), est lui-même un très grand seigneur, plus riche et puissant que le roi de France. Onze poèmes nous sont parvenus de lui, qui contiennent déjá les principales directions dans lesquelles va évoluer ce lyrisme: six de ces pièces sont d'inspiration comique, voire obscènes; une autre est une chanson de pénitence», adieu mélancolique au monde et á la chevalerie; quatre poèmes, enfin, sont d'un ton très différent, célébrant un amour tendre, patient et soumis pour une dame (domna) dont le poète se proclame le «vassal». C'est cette dernière direction qui sera cultivée par les émules de Guillaume, les troubadours, imités á leur tour á partir de la moitié du XIIe siècle par les poètes du Nord de la France, les trouvères. Le nom de troubadour dérive du verbe trobar (trovar). Issu du latin tropare, composer des tropes, c'est-Á-dire des pièces chantées, destinées á orner la liturgie, le terme met en évidence le mode d'être de cette poésie, inséparable du chant. Mais trobar arrive á désigner l'activité poétique elle-même, dans le sens d'inventer, créer. Le troubadour sera en effet l'inventeur, le créateur de la musique et des vers, des motz e'l so, qui doivent être absolument originaux :

Les formes du trobar

De cette poésie, lyrique dans le plein sens du terme, puisque le troubadour en compose les vers et la mélodie, la canso (chanson) est la forme essentielle. Il s'agit d'un poème d'un nombre variable de vers, de 40 á 60, répartis en strophes ou coblas, unités métriques, musicales et sémantiques de 6 á 10 vers, qui s'achève en général par un envoi ou tornada, dont la forme métrique reprend la fin de la dernière strophe. Le schéma métrique, l'agencement des rimes de même que la musique doivent être originaux. Les rimes peuvent être identiques dans toutes les strophes - c'est la forme la plus fréquente et la plus difficile des coblas unissonans -, elles peuvent se répéter par couples de strophes - coblas doblas - ou varier d'une strophe á l'autre - coblas singulars. Il y a aussi la rime estramp, isolée dans la strophe, mais qui se retrouve toujours á la même place dans toute la chanson. La forme métrique la plus élaborée est celle de la sextine d'Arnaud Daniel, oů les six mots á la rime, les mêmes dans toute la chanson, permutent d'une strophe á l'autre selon une loi compliquée.

Si la canso est la forme par excellence du lyrisme, au point de se confondre avec «le grand chant courtois», une diversification thématique va entraîner l'apparition de genres nouveaux. Pièces satririques, les sirventés traitent de sujets politiques (Bertran de Born) ou moraux (Marcabru, Peire Cardenal). Le planh est une complainte funèbre sur la mort d'un grand personnage (le Planh composé par Bertran de Born sur la mort du prince de Galles est un chef d'oeuvre du genre).

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