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Le Paradigme De l'Indemnisation

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ant a subi un très large scepticisme suivi d’un certain déclin, même s’il est toujours présent à notre époque. A coté de ces concepts, force est de constater que l’idée de réparation du dommage causé est de plus en plus recherchée de nos jours. Selon Brissot de Warville « La peine est une expiation du crime par le coupable, qui a pour but de réparer le tort fait à l’intérêt général ou à celui des particuliers »4. Si l’on prend en compte cette acception, il faut considérer que

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KANT (E.), De la métaphysique des mœurs, 2ème partie, Doctrine de la vertu, Paris, Vrin, 1968, p. 138. MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, nouvelle éd., Paris, Garnier, 1871, p. 79. 3 Art. 132-4 C. pén. Français consacre l’expression de « l’insertion ou la réinsertion du condamné ». 4 BRISSOT DE WARVILLE (J.P.), Théorie des lois criminelles, nouvelle éd., t. I, Paris, AILLAUD (J.P.), 1836, p.132.

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l’infraction a un caractère dommageable et que l’offense doit être réparée par le prix qui compense ce dommage5. L’idée de dommage réparable fait penser à un certain rapprochement entre le droit civil et le droit pénal, le premier essentiellement réparateur et le second, sanctionnateur. En effet, on remarque que les peines prononcées par les juridictions pénales tendent vers la réparation du dommage issu de la commission de l’infraction. Ceci peut paraitre étrange compte tenu du fait que la réparation est susceptible d’être obtenue par des moyens différents, et la peine n’est pas forcément le moyen le plus efficace. En effet, ceux qui paraissent l’être le plus vont découler d’autres procédés tels que l’action civile en réclamation de dommages intérêts ou encore la prise en charge de la victime par un assureur privé. La sanction pénale, telle qu’on l’entend couramment, fait donc moins penser à un objectif de réparation du délit que de répression, voire prévention de ce dernier…

Cependant, force est de constater que le paradigme réparateur de la sanction pénale est bel et bien celui qui subi une forte expansion de nos jours. A ceci près, il convient de préciser que la réparation de l’infraction comme « seul » but de la peine doit être limitée aux infractions les moins graves, à savoir les contraventions et les petits délits. Effectivement, lorsqu’un crime aura été commis, la volonté sera certainement plus orientée vers la répression de ce crime à l’encontre de l’auteur que vers la réparation presque impossible du dommage subi par la victime ou par ses proches. Mais ceci ne rend pas pour autant la réflexion secondaire compte tenu du fait que les crimes ne représentent qu’une infime partie du contentieux (moins de 2%). Malgré l’existence de ces différents paradigmes, on ne peut pas considérer que la finalité des peines ne répond qu’à un seul d’entre eux. En effet, on peut considérer qu’une évolution récente résiderait dans l’acceptation simultanée d’une pluralité d’objectifs. Cette conception est parfaitement illustrée par les propositions faites en Belgique par la Commission Holsters6 : « Lors de l’imposition ou de la réquisition d’une peine, il convient de tendre vers les objectifs de la peine suivants ; exprimer la désapprobation de la société à l’égard de la violation de la loi pénale, promouvoir la solution du problème et la réparation du dommage causé par l’infraction, favoriser l’intégration sociale de l’auteur et protéger la société ». Cette conception pluraliste se retrouve également dans l’article 132-24, alinéa 2 du

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VAN DE KERCHOVE (M.), Sens et non sens de la peine. Entre mythe et mystification, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2009, p. 231. 6 Commission « Tribunaux de l’application des peines, statut juridique externe des détenus et fixation de la peine », 2003, article 6 bis.

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Code pénal français qui dispose que « La nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions ».7 Ou encore le code pénal fédéral des Etats Unis8. Cette remarque permet de porter un doute sur la conception du paradigme d’une « pure restitution » élaborée par Barnett9 pour qui toutes les peines se voient exclusivement assigner la fonction de réparer le dommage subi. Mais aussi de remarquer l’apparition dans le vocabulaire pénal de l’idée de réparation du dommage subi par la victime d’une infraction pénale. Par ailleurs, comme Durkheim l’avait très justement souligné concernant l’opposition traditionnelle des théories de l’expiation et de la défense sociale, les conceptions, de la peine, qui se sont succédées historiquement étaient sans doute en réalité moins contradictoires qu’on ne l’a prétendu. On peut en dire autant aujourd’hui de l’opposition apparente de la théorie réparatrice par rapport aux théories de la rétribution ou de la prévention. En effet, l’idée de réparation ne se distingue pas réellement de celle de la prévention : lorsqu’une peine a une fonction réparatrice, elle se traduit par une perte, un appauvrissement pour le défendeur, ce qui ne saurait être étranger à toute idée de prévention. En effet, les individus ne veulent pas se soumettre à des sanctions financières au même titre qu’ils ne désirent pas se soumettre à des sanctions purement rétributives telles que la prison ou le port d’un bracelet électronique.

Pour ce qui est des rapports entre le paradigme de la réparation et celui de la rétribution, le prix à payer pour réparer l’offense peut aussi être considéré comme étant sa juste rétribution. On peut donc parler de réparation par la souffrance, au sens d’une satisfaction purement symbolique tel que le fait de permettre à la victime de faire son deuil grâce à l’obtention de la condamnation du coupable (parce que le fait de retirer un œil à au coupable ne va pas rendre le sien à la victime10). C’est ainsi que l’on considère que le procès pénal et la peine se voient attribuer une fonction de réparation psychologique à la manière d’une thérapie. Cependant, pour ce qui est des infractions de faible valeur où le préjudice est moindre, il vaut mieux opter pour une réparation plus concrète qui s’effectuera souvent en

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Art. 132-24 C. pén. issu de la loi n°2005-1549 du 12 décembre 2005. U.S. Criminal Code titre 18 section 3353 9 BARNET (R.E.), « Restitution : a new paradigm of criminal justice », in Assessing the Criminal. Restitution, Retribution and the Legal Process, éd. Cambridge, 1977. 10 En plus de cette dimension afflicitive de la peine, le délinquant devra aussi supporter la dimension infamante tirée de son arrestation, de son procès public… Et ce malgré le but indemnisateur de la peine prononcée.

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valeur ; ici on parle de l’indemnisation (la contrepartie financière pourra contribuer à rendre la vie de la victime plus agréable par le biais d’une intervention chirurgicale par exemple). C’est ainsi que ce paradigme expansionniste de la réparation va se traduire, dans nos sociétés contemporaines par l’indemnisation de la victime. C’est en ce sens, qu’il pourrait être intéressant de constater le déplacement du droit pénal vers le droit civil dans certains domaines avec l’apparition d’un certain paradigme de l’indemnisation. En effet, l’accent est de plus en plus mis sur la recherche de l’indemnisation pécuniaire de la victime d’un dommage, le plus souvent matériel ou psychologique11. Il convient de rappeler une seconde fois l’absence de recherche d’indemnisation pour les infractions qui touchent à l’intégrité physique de la victime où des peines de prison seront généralement appliquées. Effectivement, la prison ou l’amende sont des peines issues des objectifs rétributifs et préventifs compte tenu du fait qu’elles n’apportent rien à la victime, si ce n’est une certaine satisfaction morale.

Ainsi, au travers de cette étude, il conviendra de se demander en quoi la recherche et la mise en œuvre de a réparation par le droit pénal entraineraient-elles une nouvelle conception de la peine à travers un paradigme de l’indemnisation ? La tendance de la jurisprudence à appliquer un régime d’indemnisation en tout point semblable à celui utilisé par les juges civils renforce la conviction selon laquelle la juridiction répressive a aujourd’hui de nouvelles aspirations. Des auteurs vont jusqu’à affirmer que l’indemnisation de la victime devrait devenir l’un des objectifs principaux de la poursuite 12. Sans aller jusque là, on peut constater une tendance de plus en plus accrue des organes répressifs à rechercher l’indemnisation de la victime (I) ainsi qu’une mise en œuvre réelle et effective de cette indemnisation (II).

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Sera écartée de cette étude la question de savoir comment indemniser financièrement un préjudice de nature psychologique. Le principe de proportionnalité entre le dommage subi et l’indemnisation dû étant difficilement appréciable en l’espèce. 12 FAIVRE, Rep. pén., D., in Action civile, 1985, n°28.

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