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nace, c'est une émotion que l'on ressent dans la perspective d'un danger. Mais autrui, cet autre sujet pensant, à la fois autre moi et autre que moi, représente-t-il réellement un danger pour nous? Certes le regard qu'autrui nous porte peut nous sembler austère et nous faire peur, mais ne devons-nous pas dépasser ces préjugés pour nous rendre compte qu'en réalité, ce regard nous aide à nous construire, à nous connaître et qu'il est le fondement de notre propre humanité ? Selon Sartre, le regard d'autrui m'objective, me néantise, me chosifie. Il supprime tout ce qui ne correspond pas à son projet, à son intention. Je me vois et me juge comme je crois que les autres me voient et me jugent, et je suis malheureux: « ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre ». Car selon Sartre pour qui Dieu n'existe pas, c'est autrui qui nous juge. Il incarne la plus implacable des condamnations en nous renvoyant à nous-mêmes. Sartre explique qu'à travers la honte, par exemple, le sujet prend conscience de lui-même comme être au monde. Et il n'y a pas de honte sans autrui: c'est lui qui juge mes actes et m'oblige donc à faire retour sur eux et à les juger. La honte survient alors, quand mes actes ne correspondent pas à ce que je voudrais être pour autrui. Par exemple, je ramasse des billets par terre, pensant que personne ne m'a vu. Je me trouve des excuses: un autre aurait fait comme moi, on ne saura jamais à qui ça appartient, je ne suis pas un voleur etc.

Selon Michel Tournier, Autrui est la pièce maîtresse de notre univers. La crainte éprouvée par une personne face à une tierce personne naît du sentiment d'infériorité ressenti par la personne émettrice de ce sentiment de crainte. Le regard est le fondement de notre langage. Il représente l'élément premier de communication entre les êtres vivants avant même cet instrument de communication qu'est la parole. Autrui est notre prochain, que l'on rencontre dès que nous commençons à nous éveiller si l'on est en couple, dès que nous sortons de nos chambres si l'on vit en famille ou dès que l'on sort de chez soi si l'on vit seul. La rencontre avec les autres est inévitable. Le regard d'autrui par son jugement subjectif ne nous est jamais indifférent. S'il est méprisant, il peut nous détruire, nous intravertir, nous faire perdre confiance en nous, nous tenons à nous préserver psychologiquement. Il peut dans certains cas, ajoutés à d'autres circonstances, engendrer des maladies psychosomatiques comme la dépression et le désespoir, la sensation de solitude, le harcèlement moral poussé à son paroxysme peuvent conduire au suicide. Mais le rôle joué par le regard d'autrui posé sur nous n'est pas seulement négatif, il permet aux enfants de mûrir notamment à travers le regard parental, d'avoir confiance en eux, de développer leur conscience et une identité propre. Le regard a donc une fonction constructrice, favorisant notre développement interne puisqu'il pénètre notre âme au plus profond de nous-mêmes.

Après avoir montré que le regard d'autrui pouvait nous affaiblir psychologiquement, nous constaterons que ce regard n'est pas toujours négatif vis-à-vis de moi ; ensuite, nous observerons le regard d'autrui comme moyen de me remettre en question et de m'améliorer.

Tout d'abord, quoi qu'on en dise, le regard d'autrui me sort de ma solitude, me donne en quelque sorte une épaisseur, ainsi qu'une consistance, en quelque sorte, a fortiori si cet autre qui trône en face de moi s'avère être un ami, au regard alors éminemment bienveillant. Cependant, nous n'avons évidemment pas que des amis : faut-il du coup craindre le regard de ceux qui ne peuvent prétendre à ce précieux titre ? Pas systématiquement, en tous cas. Car, de fait, ce regard, chacun en conviendra, ne nous veut pas nécessairement du mal. Mais alors pourquoi sommes-nous souvent naturellement portés à en faire un objet de crainte ? Au fond, nous nous faisons peut-être simplement, naïvement des idées, nous nous méprenons peut-être quant au regard d'autrui et à sa valeur. A cet égard, Epictète souligne, dans son "Manuel", que ce ne sont pas tant les choses, les événements eux-mêmes qui troublent, empoisonnent l'homme à son insu, que la représentation qu'il peut bien en avoir. De fait, comprenons bien que ce n'est pas dans les choses elles-mêmes que réside le mal, mais, bien au contraire, dans nos propres jugements. Nous pourrions donc extrapoler ce constat au jugement que nous attribuons au regard d'autrui : en soi, celui-ci ne nous veut strictement aucun mal, il n'est pas "mauvais". En revanche, c'est nous qui nous imaginons nous-mêmes qu'il peut nous être nuisible, nocif, nous inventant du même coup de fausses craintes ! Ainsi, dans cette perspective, nos craintes ne sont pas fondées et s'avèrent purement subjectives (au sens où elles émanent du sujet lui-même, qui les nourrit, souvent à son insu). Le regard d'autrui ne devrait donc pas nous effrayer outre mesure.

Nous ne sommes nous qu'aux yeux des autres et c'est à partir du regard des autres que nous nous assumons comme nous-mêmes. Sans l'idée d'autrui (ce n'est pas nécessaire qu'il soit présent actuellement), je ne pourrais pas former le moindre jugement sur moi-même. Ce n'est pas que le regard d'autrui soit plus juste que le mien. Autrui n'est pas mieux placé que moi pour me dire qui je suis. Mais l'existence d'autrui est la condition de possibilité de la conscience de soi. Sans autrui, je ne pourrais pas même espérer me connaître. « Autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même. ». En effet, nous sommes des êtres conscients. Dès lors, nous nous regardons agir, nous nous jugeons. Nous pourrions penser spontanément que cette conscience de soi ne concerne pas autrui, ou qu'elle se fait en absence, loin de son regard. Car la relation qu'on a de soi à soi s'inscrit dans une relation avec autrui. Autrui est la condition, non seulement de mon existence, mais aussi de la connaissance que j'ai de moi. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre, dit encore Sartre. Je me juge jaloux, méchant, spirituel, je me considère comme un bon professeur, un bon père, etc.., dans la mesure même ou autrui me juge tel. Le regard que nous portons sur nous-mêmes passe par le regard qu'autrui porte sur nous-mêmes : en ce sens, autrui est une médiation entre moi et moi-même. Sartre donne un exemple fameux dans l'Etre et le Néant qui est très éclairant : je suis seul et je fais quelque chose de plus et moins répréhensible. Ce qu'il est important, c'est qu'il est illusoire de croire que je peux détacher le regard qu'autrui pose sur moi de celui que j'ai sur moi-même, comme si le premier était faux, et le second seul vrai. Non, le regard que je porte sur moi-même est constitué par le regard qu'autrui a sur moi. De plus, je construis aussi ma vie, mon identité en fonction d'autrui. Certes, je n'en suis pas nécessairement prisonnier, et la liberté suppose au contraire que je sache avoir quelques distances par rapport aux jugements d'autrui qui peuvent parfois être simplificateurs (m'enfermant dans des catégories) ; mais il m'est impossible d'y être indifférent, comme si dans le regard que je portais sur moi-même, je pourrais faire abstraction du regard d'autrui.

Dans cette dernière partie, nous montrerons qu'autrui est indispensable à mon existence par plusieurs principes. Enfin, nous finirons pas associer la honte à l'intersubjectivité.

Tout matérialisme a pour effet de traiter tous les hommes y compris soi-même comme des objets, c'est-à-dire comme un ensemble de réactions déterminées, que rien ne distingue de l'ensemble des qualités et des phénomènes qui constituent une table ou une chaise ou une pierre. Nous voulons constituer précisément le règne humain comme un ensemble de valeurs distinctes du règne matériel. Mais la subjectivité que nous atteignons là à titre de vérité n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle, car nous avons démontré que dans le cogito, on ne se découvrait pas seulement soi-même, mais aussi les autres. Par le je pense, contrairement à la philosophie de Descartes, contrairement à la philosophie de Kant, nous nous atteignons nous-mêmes en face de l'autre, et l'autre est aussi certain pour nous que nous-mêmes. Ainsi, l'homme qui s'atteint directement par le cogito découvre aussi tous les autres, et il les découvre comme la condition de son existence. Il se rend compte qu'il ne peut rien être (au sens où on dit qu'on est spirituel, ou qu'on est méchant, ou qu'on est jaloux) sauf si les autres le reconnaissent comme tel. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. Dans ces conditions, la découverte de mon intimité me découvre en même temps l'autre, comme une liberté posée en face de moi, qui ne pense, et qui ne veut que pour ou contre moi. Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres.

Tout d'abord, on peut retenir dans le texte de Sartre,

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