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Management

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s uns des autres, chacun d'eux assurément n'eût pas fait vingt épingles, peut‐être pas une seule, dans sa journée » 1 . Quant à l’anticipation, mère de la prospective, elle a toujours été plus ou moins présente dans les préoccupations des dirigeants et des auteurs, à partir du moment où il fallait investir lourdement dans les machines‐outils et dans les bâtiments qui les abritaient, ou qu’il était nécessaire de se projeter dans l’avenir pour savoir ce que l’on ferait lorsque les gisements de charbon ou de minerai en cours d’exploitation seraient épuisés.

La rationalisation du travail : le moment Taylorien‐fordien.

Malgré l’admiration de Smith devant la productivité supposée des épingliers, un ingénieur qui serait entré pour de bon dans une fabrique aurait sans doute remarqué un manque de coordination entre les postes de travail, de longs temps de pause, des gestes approximatifs … et le souci des ouvriers de ne pas trop en faire, sous peine de voir le patron en demander plus encore. Dans l’Amérique de la seconde moitié du dix‐neuvième siècle, on appelait ce ralentissement volontaire des cadences « faire le soldat ». C’est à ces freins à la production que le jeune contremaître Frederick Taylor est confronté au début de sa carrière, à la fin des années 1870. Il s’y attaque avec vigueur. Chronomètre en main, il observe et analyse avec soin les modes opératoires des meilleurs ouvriers, puis recompose le travail en combinant les gestes les plus efficaces. Il obtient ainsi la meilleure façon d’opérer, « the one best way ». Sélectionnant avec soin les hommes à l’embauche, il leur impose de soutenir le rythme ainsi « scientifiquement » établi. Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), chap.1. En fait, Adam Smith, qui a lancé l’expression « division du travail » pour désigner la différenciation des tâches, n’a jamais visité de fabrique d’épingles…

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Cette étude approfondie des tâches est une révolution. Avant Taylor, c’est l’ouvrier qui connaît le travail et l’exécute comme il l’entend. La hiérarchie demande que la production quotidienne corresponde à la norme qu’elle a fixée, mais elle ne s’intéresse pas au mode opératoire. Avec l’organisation scientifique du travail, le bureau des méthodes et les contremaîtres « fonctionnels » prennent la maîtrise du savoir‐faire. Contrairement à beaucoup de ceux qui adopteront ses méthodes, Taylor joue le jeu : il partage les gains de productivité entre l’employeur et les ouvriers, dont les salaires sont fortement augmentés s’ils respectent ou dépassent la norme. Le premier grand industriel de l’automobile, Henry Ford, partage les idées de Taylor. Il impose l’organisation, demande des rendements élevés, et donne en contrepartie de bons salaires. C’est d’ailleurs nécessaire pour limiter la rotation rapide des ouvriers, qui n’apprécient guère le travail à la chaîne qu’il a institué. Ce donnant‐donnant restera dans l’histoire comme la base du « compromis fordien ».

L’organisation du travail de direction : Henri Fayol

Avec Henri Fayol, brillant produit de l’école des Mines, ingénieur à dix‐neuf ans et Directeur général à quarante‐sept, on passe de l’organisation de l’atelier à celle de la Direction générale. Patron des mines de Commentry et de Decazeville, il est confronté à des problèmes plus complexes que ceux rencontrés par Taylor dans les aciéries de Philadelphie, et il les regarde de plus haut. Il voit rapidement que la productivité du travail est une chose, le coût total des produits à la sortie de l’usine, une autre. Il comprend que le prix des approvisionnements, la fiabilité des outils, la disposition des lieux de travail et la qualité de l’encadrement comptent tout autant que le tonnage de charbon extrait quotidiennement par chaque mineur. Il va tirer de sa longue expérience des leçons pour le dirigeant, qu’il publiera en 1916 dans un livre qui fera le tour du monde : « Administration industrielle et générale ». Les futurs cadres des années 2 000 apprennent encore les six fonctions de l’entreprise : la technique, le commercial, la finance, la comptabilité, la sécurité, l’administration. Les cinq premières sont confiées à des spécialistes. La sixième est la raison d’être du dirigeant, et s’organise autour de cinq compétences : prévoir, organiser, coordonner, commander et contrôler. Aujourd’hui, à « commander » on préfère « animer », et aux cinq tâches de base, on ajoute l’obligation de faire progresser les compétences de ses collaborateurs. Mais Fayol reste un classique. En matière d’anticipation, il avait fixé des règles montrant le souci de la cohérence entre une vision à long terme, qu’il voulait aussi fiable que possible, et la gestion quotidienne. La programmation à court terme (mensuelle, hebdomadaire et quotidienne) était du ressort des managers de terrain. La Direction générale avait en charge le moyen et le long terme. Fayol faisait des prévisions à dix ans, réajustées chaque année en cohérence avec le budget annuel et totalement refaites tous les cinq ans.

Une pionnière du management moderne : Mary Parker Follett

Mary Parker Follett, l’un des auteurs les plus originaux et les plus brillants du management, n’a commencé à s’intéresser à la direction des entreprises qu’à partir du milieu des années 1920, une quinzaine d’années après la parution des « Principes du management scientifique» de Taylor. L’organisation scientifique du travail avait alors été adoptée par de nombreux industriels américains et britanniques avec qui Follett était en contact. Elle en appréciait les progrès dans l’organisation et la productivité, mais n’adhérait pas à la vision mécaniste de l’homme que suppose le taylorisme. Pour elle, chacun a sa dignité et sa compétence. Un directeur a une vision plus large de l’entreprise qu’un ouvrier, mais il connaît mal la machine que le second maîtrise parfaitement. Les deux professionnels sont aussi utiles l’un que l’autre à la société. Follett prône un management respectueux des personnes, avec des dirigeants exerçant un « pouvoir‐avec » plutôt qu’un « pouvoir‐sur » leurs collaborateurs. Consciente des différences de positions et d’objectifs des divers groupes qui constituent une entreprise, elle considère les conflits comme inévitables et même nécessaires, idée révolutionnaire à

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l’époque. Elle analyse leur traitement et préconise une méthode : l’intégration, façon de sortir par le haut d’une situation conflictuelle, qui sera reprise quelques décennies plus tard sous l’appellation « Win‐win » (gagnant‐gagnant). Elle avait une approche très moderne de la prospective. Pour elle, le leader c’est celui qui anticipe, qui agit et qui évalue. “ La vision pour distinguer de nouveaux chemins, le courage de s’y engager, le jugement pour mesurer les résultats ‐ voilà quelles sont les compétences du leader. ” 2 La marque d’un bon dirigeant, c’est de ne jamais se laisser dépasser par les événements. Les millions de cadres travaillant toujours dans l’urgence savent que « Dans la gestion courante d’une organisation, le besoin fréquent de prendre une décision rapidement est le signe d’un manque d’anticipation » (Follett, 1941, p. 252), autrement dit, un signe d’incompétence du dirigeant ou de mauvaise organisation de l’entreprise. Mary Parker Follett conçoit l’anticipation comme une authentique démarche prospective. Elle s’appuie en tout premier lieu sur la « vision » : « La vision de l’avenir, et la foi dans cet avenir, c’est ce qu’on appelle habituellement dans l’entreprise “anticipation” » 3 A partir du moment où l’on connaît la direction dans laquelle on veut aller, il faut agir aujourd’hui en fonction d’un futur probable : « Pour être utilisables, les prévisions de l’entreprise sont toujours, ou devraient toujours être basées sur un futur probable. La politique de vente, par exemple, n’est pas guidée seulement par l’historique des ventes, mais par ce que l’on pense pouvoir vendre dans l’avenir » 4 . Et le dirigeant de qualité ne se contente pas de « regarder l’avenir pour éclairer le présent » : il fait ce qu’il faut pour que le futur souhaité se réalise. Il est proactif : « Anticiper, ce n’est pas seulement prévoir ; c’est beaucoup plus que prédire ce que sera le prochain événement. C’est plus que faire face au prochain événement, c’est créer le prochain événement. » 5

Le temps des psychologues : Elton Mayo et l’école des relations humaines

Dans les années 1930, l’idée que l’homme n’est pas qu’une masse de muscles fait son chemin, et pas seulement chez Follett. Grâce à une série d’expériences menées à Hawthorne, près de Chicago, dans

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