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la Juste Valeur soulève d’importantes questions. Afin d’éclairer l’impact de cette notion dans les développements de la crise actuelle, elle propose un examen spécifique du secteur bancaire.

Juste Valeur et secteur bancaire

L’introduction de la norme IAS 39, relative aux éléments financiers, a apporté trois « ingrédients » nouveaux, qui méritent d’être relevés. D’abord, tous les produits dérivés doivent être désormais évalués en Juste Valeur, et ceci quelle que soit leur destination – qu’il s’agisse de spéculation ou de couverture. Cette disposition vise l’inscription des produits dérivés au bilan. D’autre part, il a été donné une définition générique de ces « dérivés », incluant certains éléments appartenant à la catégorie des commodities, ainsi que les éléments indexés (comme les produits indexés sur un indice-

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Juste Valeur : le rôle des nouvelles normes comptables dans la crise financière

boursier). Enfin, a été formulée la règle selon laquelle la cotation d’un produit sur un marché actif entraîne automatiquement sa cotation en Juste Valeur. De la sorte, de très nombreux éléments financiers ont toutes les chances de devoir être évalués en Juste Valeur ; en particulier, tous les éléments de couverture sont appelés à l’être. Dans le secteur bancaire, à l’évidence, l’impact est important. Si la Juste Valeur concerne la plupart des éléments financiers intervenant dans les activités de banque d’investissement, elle frappe également les actifs de couverture mis en jeu dans les activités de banque commerciale (prêts et dépôts). De fait, l’IASB (International Accounting Standard Board, normalisateur comptable international) se refuse à créer des normes sectorielles.

Le dispositif comptable prévoit qu’en l’absence de marché actif – et donc de prix de marché – soit introduite une part de jugement, via une estimation interne de la Juste Valeur. La critique se concentre sur ce risque : si le but de la Juste Valeur est de rendre objectives les évaluations, les modalités applicables en l’absence de transaction tendent plutôt à créer une pluralité de Justes Valeurs différentes. Ce problème, surgissant en période de crise, n’existerait pas, a-t-on dit, si l’on avait préféré une valorisation au coût historique par exemple. La question se pose donc de savoir qui détermine la Juste Valeur dans des conditions telles que celles que nous connaissons actuellement. Le normalisateur comptable a réagi, notamment en amendant la disposition IAS39 sur les instruments financiers. La position adoptée par l’IASB a été d’autoriser les firmes qui déclarent se placer dans une optique de long terme à évaluer certains produits financiers au coût historique amorti. Dans un deuxième temps, l’IASB, actant la difficulté d’établir une évaluation objective a proposé d’améliorer la transparence financière, les établissements financiers devant décrire leurs modèles d’évaluation, en cas de recours à une évaluation interne.

Les relations entre la crise et les nouvelles normes

En quoi la crise a-t-elle accentué les difficultés nées des récentes normes IFRS ? D’une part, il est indéniable que ces normes ont joué un rôle procyclique. La volatilité des marchés se retrouvant dans le bilan et le compte de résultat des entreprises, obligées de passer des dépréciations massives dans un contexte fortement baissier, entretenant ainsi la spirale baissière des prix des actifs. D’autre part, la valorisation aux prix de marché a accentué l’inefficacité des instruments de couverture. Mais si la volatilité des marchés affecte la situation des entreprises, il faut aussi tenir compte de la situation d’illiquidité caractérisant des pans entiers du marché. En effet, alors qu’il est facile de trouver une Juste Valeur dans un marché actif, cette méthode de valorisation devient épineuse en l’absence de transactions, comme c’est actuellement le cas pour les produits structurés les plus complexes.

À propos de la valeur « stressée »

Benoît Cougnaud interroge Mireille Berthelot sur l’opportunité d’introduire dans les normes comptables une composante de valorisation « stressée », réduisant ainsi la sensibilité de la valeur vis-à-vis de la situation conjoncturelle des marchés. Mireille Berthelot apporte une réponse nuancée. La difficulté, initialement, résidait dans la complexité des produits dérivés, ceux-ci étant tellement structurés qu’on n’arrivait plus guère à identifier le sous-jacent sur lesquels ils reposaient. L’établissement d’une valeur « stressée » sur de tels produits est plus

Working paper n°25 — Février 2009

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que problématique. D’autre part, il n’est pas certain que la comptabilité ait vocation à introduire une notion de « stress » (c’est-à-dire à inclure des calculs probabilistes de résilience en fonction de différents scénarii). C’est davantage le rôle de l’information financière, que de diffuser des valeurs « stressées », que celui de la comptabilité stricto sensu.

marché oblige les banques, pour satisfaire aux exigences de capitalisation, à vendre des actifs qu’elles n’auraient sans doute pas eu à vendre si l’on n’avait eu recours à la valorisation en Juste Valeur. Sur ce point, la question ne semble pas porter sur la comptabilité, mais sur la formulation des ratios prudentiels. Il faut plutôt souhaiter une réforme de Bâle II, que de la comptabilité ! La seconde critique porte sur l’illiquidité : les normes IFRS seraient pour partie responsables du tarissement des marchés. Mais il faut rappeler que les normes sur la Juste Valeur permettent, comme on l’a dit, de circonvenir à ce piège en l’absence de marché actif. Dans beaucoup de cas, ce qu’il faut incriminer, c’est l’incapacité des banques à établir des modèles financiers d’évaluation interne acceptables. Ce sous-investissement en matière de modélisation financière est en grande partie responsable de la déroute des établissements financiers, incapables de valoriser des instruments financiers en cas de cessation des transactions sur certaines classes d’actifs.

NICOLAS VÉRON

Économiste, Bruegel

Nicolas Véron reconnaît que les questions de comptabilité sont difficiles à aborder en économie. Il ne lui semble pas que les normes comptables soient responsables de la crise, en dépit des justes critiques que l’on peut formuler à l’encontre de l’IASB. C’est plutôt l’opacité qui est à l’origine de l’anxiété qui a animé les marchés depuis plus d’un an. Les bilans bancaires sont illisibles pour le profane comme pour le professionnel, et tout se passe comme si l’outil dont nous disposons pour l’évaluation financière était « cassé ».

Plaidoyer pour la Juste Valeur

Nicolas Véron retient deux critiques formulées contre l’utilisation de la notion de Juste Valeur. D’abord, on accuse le recours à l’évaluation en Juste Valeur d’introduire un élément de procyclicité. En tant que tel, cet argument paraît peu recevable. La comptabilité a pour vocation de donner une image de la situation des firmes dans des conditions de marché données. Les alternatives à la Juste Valeur amèneraient sans doute à une situation absurde où les bilans des banques indiqueraient qu’il n’y a pas de crise ! Mais un problème demeure : l’usage de la valorisation aux prix de

Pourquoi les normes comptables sont critiquées ?

Enfin, Nicolas Véron propose de comprendre les critiques des normes IFRS de la façon suivante : personne n’aime les mauvaises nouvelles, or ce que ces normes renvoient est une juste évaluation de la situation, internalisée à bon escient par les marchés. Ceux qui accusent les normes comptables d’introduire une sous-évaluation délétère du prix des actifs ne font pas autre chose que nier une réalité correctement perçue par les marchés ! En conclusion, les normes comptables ne sont pas si mauvaises. Elles ne sont pas un diktat arbitraire de l’IASB. Si la personnalité des normalisateurs

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Juste Valeur : le rôle des nouvelles normes comptables dans la crise financière

comptables pourrait parfois laisser penser le contraire, ces normes sont moins la traduction des édits d’« ayatollahs » que le produit d’essais et d’erreurs judicieusement synthétisés. Pour autant il faut bien convenir d’une crise de l’information financière. Mais là où le bât blesse, c’est plutôt dans l’outillage disponible pour informer le marché quant aux risques existants. Comme le suggère l’IASB, on peut ajouter des annexes techniques aux comptes sociaux en espérant améliorer la transparence de l’information financière. Mais il est vrai que dans les faits, les investisseurs ne lisent pas ces annexes ! La question qui se pose est donc la suivante : qui va synthétiser les informations pertinentes ? Jusqu’en août 2007, on croyait encore que les agences de notations remplissaient ce rôle. Aujourd’hui ces dernières subissent une profonde crise de légitimité. D’un point de vue pratique, le meilleur moyen pour contrer les réels

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