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Tocqueville

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e ne fait qu’aggraver.

Tocqueville envisage depuis longtemps d'embrasser une carrière politique lorsque, fort du succès de De la démocratie en Amérique, il se présente pour la première fois devant les électeurs le 4 novembre 1837. Il a longuement hésité sur la circonscription à briguer et a sincèrement envisagé celle du Xe arrondissement de Paris, c'est-à-dire à l'époque celle du faubourg Saint-Germain et du quartier latin, avant de renouer avec sa terre d'origine en se portant finalement candidat au siège de député de Valognes dans la Manche. Cette première tentative est un échec puisque le candidat sortant, Polydor Le Marois, qui sera longtemps son adversaire politique local, l'emporte sur lui au deuxième tour de scrutin par 247 voix contre 221. Ce sera le seul revers électoral de sa carrière, puisque après avoir été élu à ce même siège le 2 mars 1839 par 318 voix contre 240 à Polydor Le Marois, qu'il affronte de nouveau, il est successivement reconduit dans son mandat en juillet 1842, puis le 1er août 1846, ainsi que durant la Seconde République. Lors de son entrée à la Chambre des députés en 1839, Tocqueville, qui tient à effacer la connotation légitimiste attachée à son patronyme et à marquer sa fidélité avec ses électeurs, insiste pour siéger à la gauche de la Chambre où il obtient finalement le numéro 319, au centre gauche de l'assemblée. Il connaît cependant davantage de difficultés encore à trouver sa place dans le "misérable monde politique" et parmi ceux qui le composent, étant donné qu'il refuse toute alliance avec Thiers ou avec Guizot et qu'il déplore l'absence d'une opposition constituée. La position marginale qu'il occupe alors ne s'améliore guère au fur et à mesure que les sessions parlementaires succèdent les unes aux autres et il est le premier à déplorer son impassibilité politique tout en persistant à refuser de s'associer de façon permanente avec aucun de ses collègues. Il joue alors le rôle d' "homme spécial", chargé de l'étude de dossiers particuliers, comme ceux de l'émancipation des esclaves dans les colonies françaises, de la colonisation de l'Algérie ou de la réforme des prisons, auxquels ses expériences antérieures, ses aptitudes spécifiques ainsi que son goût pour la littérature grise le destinent tout particulièrement.

Il tente certes au lendemain des élections de 1846, qui voient les conservateurs l'emporter, de fonder avec certains de ses amis politiques comme Corcelle ou Dufaure, le parti de la "jeune gauche", qui se propose de lutter dans ses grandes lignes contre la corruption des élus politiques, de redistribuer l'impôt et de multiplier les formes d'aides sociales, dans un souci constant de concilier une forme de libéralisme politique avec la justice sociale. Mais cette tentative restée infructueuse ne sauve pas Tocqueville de son isolement politique et la Chambre de cet immobilisme aggravé durant les dernières années du régime au point de le mettre en péril.

Convictions

Liberté : Lorsque Tocqueville se considère lui-même, dans un petit fragment intitulé "Mon instinct, mes opinions", pour tenter de déterminer quelles sont les "principes sérieux" qui gouvernent sa pensée comme son action politique, il aboutit à la conclusion que "la liberté est la première de [s]es passions". Or il est juste que son œuvre, que l'on pense à De la démocratie en Amérique, ouvrage largement consacré à la question de la conciliation des principes d'égalité et de liberté, ou encore à L'Ancien Régime et la Révolution, qui étudie notamment l'implacable aspiration à la liberté des Français du XVIIIe siècle, trouve notamment sa cohérence dans la place essentielle qu'elle accorde à l'idée de liberté. Il ne faut cependant pas omettre d'ajouter que Tocqueville a également mis son engagement politique au service de cette cause, qu'il a défendue pied à pied, cherchant sans cesse à garantir les libertés publiques et individuelles au sein de la société, qu'elle soit de nature démocratique ou pas. Il se montre tout d'abord, durant sa carrière de député, un fervent partisan de la liberté de l'enseignement, dont il ne fait pas une question confessionnelle et qu'il considère plutôt comme le garant de la diversification de la culture moderne, qui ne saurait que bénéficier du renouvellement incessant des innovations scolaires. Ce sont des principes du même ordre qui l'amène à défendre également la liberté de culte : que l'on puisse pratiquer d'autres cultes en France que le catholicisme ne lui paraît guère dangereux pour la société, pourvu que l'on adhère librement à une croyance morale unificatrice qu'il considère, en revanche, comme nécessaire à la réussite de l'organisation sociale et comme. source d'aspiration à la liberté. Tocqueville développe ainsi la pensée d'une sorte de "cercle vertueux de la liberté", dans lequel les libertés particulières, que sont par exemple la liberté de l'enseignement, la liberté de culte ou la liberté de la presse, engendreraient chez les peuples l'esprit et les habitudes de la liberté qui produiraient à leur tour le développement du commerce entre les peuples, dont le dernier corollaire ne serait autre que la garantie de la paix entre les nations. Aussi est-ce pour défendre ces idées qu'il décide de tirer profit de la liberté de la presse - largement garantie par le régime de la Monarchie de Juillet - et de saisir l'occasion qui lui est offerte en 1844 de prendre la direction du journal Le Commerce, qui connaît alors de graves difficultés financières. La nouvelle équipe du journal rassemble autour de Tocqueville certains de ses amis comme Corcelle ou Lanjuinais et elle choisit de confier la fonction de rédacteur en chef à Arnold Scheffer, le frère du célèbre peintre Ary Scheffer

Le 24 juillet 1844 paraît le premier numéro de cette nouvelle ère du Commerce, qui se proclame d'emblée comme l'organe de ce "grand parti national qui n'a cessé de travailler, à travers toutes les vicissitudes d'un demi-siècle de révolutions, à constituer parmi nous la liberté politique et l'égalité devant la loi". Malheureusement cette initiative est un échec et Tocqueville cesse d'y jouer un rôle quelconque dès le mois de juin 1845, alors qu'il regrette déjà que doive disparaître "la seule représentation véritable des idées libérales dans la presse".

Paupérisme : Lorsque Tocqueville découvre en Angleterre le spectacle apocalyptique que lui offre la vue des quartiers d'ouvriers de Manchester, il est immédiatement frappé par le paradoxe auquel il est si brusquement confronté : alors que la révolution industrielle démultiplie les capacités de production des richesses qu'elle déverse sur le monde entier, elle se développe au prix d'une véritable exploitation des classes sociales les plus défavorisées qui se trouvent dans un état de paupérisation toujours plus grand. Or, ce mouvement n'épargne pas la France dont les campagnes se vident, leurs habitants préférant venir grossir le rang de la population ouvrière des grandes villes. "La marche progressive de la civilisation moderne augmente graduellement, et dans une proportion plus ou moins rapide, le nombre de ceux qui sont portés à recourir à la charité" : tel est le constat initial dressé par Tocqueville à l'entrée de son Mémoire sur le paupérisme, qu'il rédige pour le Conseil général de la Manche et dans lequel il cherche précisément à déterminer les remèdes qu'il convient d'apporter à "de pareils maux". Il évoque tout d'abord le recours à la "charité privée" qu'il pratique lui-même assidûment envers les habitants les plus démunis du village de Tocqueville et qui présente à ses yeux l'avantage majeur d'établir des liens de solidarité entre les classes les plus aisées et les couches les plus faibles d'une société tout en n'installant pas ces dernières dans le trop grand confort d'une assistance systématique. Il considère également que "l'association de personnes charitables, en régularisant les secours, pourrait donner à la bienfaisance individuelle plus d'activité et plus de puissance" et se prononce en faveur de la formation à l'échelle communale de telles associations caritatives "pour l'extinction du vagabondage et de la mendicité", qui fonctionneraient sur la base du volontariat et du bénévolat. Ce dernier point suffirait de nouveau, selon Tocqueville, à éviter à la société de courir le risque de l'instauration d'une aide sociale garantie pour les plus démunis. Car ce qu'il faut absolument éviter en la matière, d'après lui, c'est de "créer une classe oisive et paresseuse, vivant aux dépens de la classe industrieuse et travaillante". Aussi est-ce pour cette raison qu'il réfute l'hypothèse de l'organisation d'une "charité légale", garantie par l'État lui-même, qui lui paraît certes constituer une "belle et séduisante théorie" mais dont les effets ne manqueraient pas, comme cela s'est produit en Angleterre, de se révéler néfastes à l'ensemble de la société comme à ses éléments les plus défavorisés. Il admet néanmoins une exception à cette règle proscrivant le recours à la "charité

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