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Femmes marocain

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Maroc colonial. Quel a été l’impact de la colonisation ? La lutte pour l’indépendance a-t-elle permis l’émancipation des femmes ? La situation des femmes du Maroc indépendant constituera le second volet de cette contribution et consistera dans une lecture synthétique des différentes phases de l’évolution des rôles et statuts des femmes.

Les femmes dans le Maroc colonial

Durant la période de la lutte pour l’indépendance, la question de l’émancipation des femmes s’est posée dans un contexte marqué par l’agression coloniale, la défense de l’identité musulmane et la revendication nationaliste. Dans cette perspective, la question féminine s’est réduite principalement à la revendication de l’instruction des jeunes filles musulmanes, avec cette triple limite qu’il s’agit d’une instruction axée sur la morale et l’histoire de l’islam et préparant les jeunes filles, à travers des travaux manuels de type domestique, au rôle de reproductrices qui leur est assigné au sein de la société. Au contact des colons, un réaménagement des codes culturels s’est vu activé, générant des interactions entre mots, objets et croyances dans le cadre des rapports entre ces communautés et les populations locales. Dans leur explication de la formation du lien social dans le Maroc précolonial, les savants coloniaux et anthropologues contemporains ont produit une typologie à deux termes, éclairante, mais réductrice. Ils ont opposé l’islam scripturaire des lettrés – masculin et citadin – à l’islam vernaculaire, transmis par la tradition orale – et donc par la société des femmes – et majoritairement paysan. Mais la fascination pour les croyances locales a trop mis en exergue un islam de femmes basé sur des pratiques déviantes. Dans ce contexte colonial, les remaniements culturels se sont opérés de manière différenciée selon le milieu d’appartenance. A l’intérieur de la société, ce qui frappe, c’est la ruralité du Maroc. Le pourcentage de la société citadine reste inférieur à 10 %. Le Maroc a engendré de grandes cités (Fès, Marrakech) et des villes moyennes (Tétouan) analogues à celles du Proche-Orient. Les rapports entre l’homme et la femme ne répondaient pas à des critères simples 1.

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Daniel Rivet, Le Maghreb à l’épreuve de la colonisation, Hachette, 2003.

FEMMES DU MAROC ENTRE HIER ET AUJOURD’HUI

La place des femme dans la famille bourgeoise ne changeait pas au même rythme que celui des femmes des faubourgs et des bidonvilles ou encore moins de celui des femmes rurales. Au sein des vieilles cités, la morphologie de la famille a commencé à changer. La polygamie a connu un reflux irréversible. Sous l’influence du réformisme musulman, les formes de croyance se sont modifiées. D’une part, la réforme (l’islâh) a contribué à épurer certaines pratiques religieuses féminines, en luttant contre les déviations supposées de l’islam et en naturalisant l’idéal de la « femme nouvelle » (al mar’a al jadida). En neutralisant la charge émotionnelle de la pratique religieuse des femmes (confréries, zaouias, saints…), l’islam salafiste surveille et contraint les croyances et les représentations des femmes. Cet idéal de la femme nouvelle, légitimé par le modernisme oriental que véhicule abondamment la radio arabe et le film égyptien après 1945, a travaillé ardemment l’imaginaire des jeunes femmes citadines.

Changement de perception et nouveaux rôles

Dans la société citadine, l’évolution s’opère sous l’influence de la salafiyya. Elle est donc rythmée et modulée par les hommes. C’est d’abord l’accès des femmes à la mosquée et aux biens spirituels et au travail. La bourgeoisie est à la recherche d’un style de vie nouveau qui valorise l’idéal de la femme d’intérieur accomplie : mère consciente de ses devoirs d’éducatrice, d’épouse et de gardienne des valeurs. Des femmes de la « bonne société » accèdent au savoir coranique diffusé dans des Kutab (écoles) spécialisées. D’autres fondent et dirigent des congrégations féminines marquées par des pratiques de dévotion parallèles et non pas antagonistes de celles des hommes. Et surtout, les femmes initient les petits garçons à la religion musulmane : bribes du texte coranique, hymnes en l’honneur du Prophète. En milieu populaire citadin ou périurbain, le travail salarié constitue le changement social le plus spectaculaire. La colonisation met au travail un nombre considérable de femmes : ouvrières agricoles saisonnières, employées dans les conserveries de poissons, de légumes et de fruits, ouvrières d’usines, employées de maison. Le recensement de 1952 fait ressortir qu’une femme sur huit est salariée. Le travail salarié révèle au plein jour une catégorie, nouvelle et numériquement significative, de femmes chefs de famille. La grande ville industrielle met en scène une catégorie de femmes que

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HAYAT ZERARI

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la société cantonnait aux seconds rôles. Cette sortie n’est pas accompagnée de changement de perception de soi. Un déphasage est ainsi constaté entre une conscience collective dormante et des conditions économique et sociale en pleine mutation 2. La colonisation accentue la séparation entre les sexes en ville, là où les contacts intercommunautaires se multiplient 3. Les hommes se durcissent avec les femmes comme s’ils reportaient sur elles la responsabilité de leur malheur historique et le leur faisaient expier par un détournement de culpabilité. Jacques Berque affirmait que la colonisation a exacerbé la masculinité de l’homme maghrébin. Privé de la maîtrise de son histoire, il compense en se repliant sur sa foi et sa sexualité. La femme est pour lui un conservatoire de la nationalité vaincue. La famille s’offre comme un refuge où se pansent les blessures qu’inflige à l’homme la situation coloniale. Si la claustration des femmes s’accentue, c’est pour les soustraire au désir des vainqueurs. Ainsi, des opuscules et traités de morale à répétition déplorent « la corruption des mœurs » du fait du dévergondage des femmes. Il y aura, dans le courant des années 1920, une critique acharnée des mariages somptuaires par les réformistes musulmans. Ainsi les hommes n’assistent pas à cette effervescence sans réagir. L’intrusion des femmes dans l’espace public provoque une crispation masculine devant la femme nouvelle. L’irruption timide des femmes sur la scène sociale entame un processus de changement du rapport masculin/féminin. Les résistances aux changements s’expriment de différentes manières notamment à travers la violence contre les femmes dont la fréquence a été relevée. Plus globalement, la colonisation ne dérégule pas le rapport entre masculin et féminin, mais agit comme un révélateur. Elle expose la faille entre les genres et l’approfondit. Mais elle ne fait qu’ébranler, sauf à la marge, la force d’inertie face au changement qui reste considérable.

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La situation des femmes et des hommes dans le Maroc d’aujourd’hui

Les données socio-démographiques témoignent des transformations profondes ayant vivement changé tant le profil

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Daniel Rivet, op. cit. Daniel Rivet, op. cit.

FEMMES DU MAROC ENTRE HIER ET AUJOURD’HUI

économique et social que politique du Maroc. Ces changements confirment la nécessité d’assurer une place égale aux hommes et aux femmes au niveau du développement humain et social du pays. Le pourcentage de la population urbaine est en progression permanente. Le Maroc d’aujourd’hui compte plus de population urbaine que rurale. L’urbanisation du pays se consolide et une forte migration vers les zones urbaines marque la mobilité des populations. Le recul de l’âge moyen au premier mariage et la baisse du taux de la fécondité témoignent de transformations sociales et culturelles significatives dans la vie des femmes. La présentation succincte de l’évolution observée au niveau des domaines de l’éducation, de la santé reproductive, de l’emploi et du politique témoigne non seulement du chemin parcouru en terme de changement de perception du rôle et du statut des femmes mais elle permet aussi de voir les écarts persistants à surmonter en terme d’inégalité de genre. Éducation et émancipation L’accès à l’éducation a constitué un tremplin important favorisant non seulement le décloisonnement de l’espace public et sa mixité mais aussi l’investissement personnel et la possibilité de se construire un avenir en dehors des rôles socialement attribués. L’école a formé les premières générations de filles qui, par la suite, ont pu accéder au travail rémunéré, aux responsabilités publiques et politiques. A l’aube de l’indépendance, la scolarisation des filles est restée un phénomène citadin. La première école pour les filles musulmanes a vu le jour en 1931 à Salé et était destinée aux filles de notables. Les années quarante ont permis de consolider l’initiative par la création

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