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Rousseau Le Contrat Social

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tique, de par les apories le parcourant, et, indirectement, par les faux procès qui lui furent intentés.

I) Des hommes à l'Etat, formation du corps social

Comment passer de l'état de nature où les hommes vivent séparément, dans l'indifférence réciproque de leurs congénères, à un corps social organisé politiquement, c'est-à-dire à un Etat ?

À la base de cette transformation se trouve la notion de pacte social. Déjà, Hobbes comme d'autres ont buté sur ce pacte, mais Rousseau donne à cette notion un contenu encore jamais imaginé.

Il faut d'abord observer la distinction entre l'autorité naturelle et politique. À l'état de nature, le droit du plus fort est de règle et l'homme est naturellement inégal. Le fondement de l'autorité est uniquement la force - et cela suffit bien. L'autorité politique est tout autre, en ce qu'elle est fondée sur le droit. Notion abstraite, le droit est supérieur à la force. Mais, simple notion, le droit fait appel au consentement volontaire des individus. On voit ainsi que pour être légitime, tout contrat repose sur un acte volontairement consenti - y compris le pacte social.

Les conditions de validité du pacte social ne se limitent pas au libre-consentement. Sur le plan formel, les consentants doivent implicitement jouir de leur liberté, et ont conscience d'accepter des obligations réciproques. Rousseau esquisse aussi des non-conditions disqualifiant les pseudo-pactes sociaux. Ainsi du pacte de soumission et d'esclavage de Grotius et Hobbes, contrat non-réciproque et privant de sa liberté. Sur le point du contenu, il est clair que sera nul tout pacte avilissant ou mortel.

Le pacte social proprement dit. En somme, le pacte social devra inclure la sauvegarde de la liberté individuelle, prise dans sa première acception, à mille lieues de la définition qu'en donnera Kant. Le but du pacte social n'est autre que l'utilité. Abandonner sa liberté naturelle, liberté négative, au profit d'une liberté civile, ou politique, garantie par l'ensemble des contractants n'est pas évident. Mais Rousseau synthétise ainsi le pacte : "chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale; et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout." Instantanément, le contractant perd TOUT : possessions, liberté, droits. Immédiatement, il les récupère sous une autre forme, avec en plus pour ceux-ci la légitimité du pacte (garanti par l'intérêt collectif et indivisible de tous les contractants), et en échange il est tenu à un certain nombre d'obligations communes.

À l'instant où est conclu le pacte, naît une personne morale, dotée d'un corps : les contractants. Ce corps, passif, est l'Etat. Actif, il est le souverain. En tant que partie de l'autorité souveraine, les individus sont citoyens, en tant que soumis à l'Etat, ils sont sujets, dans la terminologie de Rousseau.

Isolément, chacun de ces termes a déjà été vu et conçu par les écrivains politiques ayant précédé Rousseau. Là où son "Contrat social" ouvre des perspectives radicalement nouvelles, c'est dans la conception et le rôle du souverain et de la volonté générale.

La souveraineté, d'abord, doit être étudiée. Elle n'est en fait rien d'autre que l'exercice de la volonté générale, notion qui sera vue ensuite. Elle se résume donc à la force publique et n'est ni bonne ni mauvaise en soi. L'idée de souveraineté "du" peuple peut signifier que la souveraineté a sa source dans le peuple. C'est une conception ancienne déjà vue par Jurieu. Rousseau ajoute : cela signifie aussi que le peuple doit garder pour lui-même l'exercice de cette souveraineté.

La volonté générale, elle, est la volonté qui conduit la force publique. Fondamentalement, cette volonté est juste, rationnelle. Il faut la distinguer de la volonté particulière (d'un individu) ou de l'addition de celles-ci, la distinguer aussi de la volonté de tous (intérêt commun). Dans l'idéal, cette volonté générale ne peut prendre de mesure injustifiée, et est conduite par le principe que ce qui est utile à chacun l'est à tous. "La volonté constante de tous les membres de l'Etat est la volonté générale, c'est par elle qu'ils sont citoyens et libres. (...) Quand donc l'avis contraire au mien l'emporte, cela ne prouve autre chose sinon que je m'étais trompé." Générale, cette volonté est indivisible et ne peut statuer sur des intérêts particuliers, ni se pencher sur quoi que ce soit d'individuel, ni se répartir en corps séparés ou spécialisés. C'est pourquoi, si elle est à la base des lois, les lois ne sauraient s'appliquer à un être précis. Un obstacle à rejeter absolument est logiquement une société partielle, où les intérêts ne seraient pas communs mais réservés à des groupe de motivations différentes. Le droit du souverain (donc, la souveraineté), même dans ces limites ainsi tracées, est encore borné : à l'utilité publique.

En somme, Rousseau nous montre ici la façon dont devrait s'organiser une communauté en nation. Du groupe d'hommes à l'état de nature ou guère civilisé, par le biais du pacte social, on devient un Etat souverain, doté d'une volonté. L'Etat a donc un corps et une âme. Cette volonté est issue de la raison; le pacte est la seule association également profitable à chacun. Dans le champ de la pure pensée politique, comme dans celui de la politique bien réelle, on conçoit le poids de ces propositions, et le large écart entre ce modèle pensé parfait les Etats contemporains à Rousseau. Mais cette perspective est associée à une mise en garde : "Peuples libres, souvenez-vous de cette maxime : on peut acquérir la liberté, mais on ne la recouvre jamais." (II, 8).

II) Conduire l'Etat : la volonté et le gouvernement du corps social

Il est une limite à laquelle se sont heurtés nombre de penseurs du politique, celle de la définition de l'intérêt commun, et du choix en conséquence du gouvernement. On pourrait croire que ces premiers points du "Contrat social" ont fourni la réponse : le peuple est souverain, donc sa volonté général est légitime, donc il mène ses propres affaires. Erreur ! Ce n'est pas aussi simple. Rousseau démontre que la volonté générale ne peut pas gouverner, mais délègue son pouvoir.

Pour voir cela, faisons une entorse à la logique du plan et traçons déjà la distinction des trois types de gouvernement possibles d'après Rousseau. Le premier est la démocratie où la majorité du peuple est gouvernement (nous reviendrons sur celui-ci). Le second est l'aristocratie où moins de la moitié du peuple dispose du gouvernement. Le troisième est la monarchie où le gouvernement est concentré en une seule personne. Le cas de la démocratie est particulier : ce régime est le seul où la volonté générale des citoyens est confondue (en termes d'hommes, mais pas dans un même temps de toutes façons) avec le gouvernement. En monarchie et en aristocratie, la plus grande partie de l'Etat n'y participe pas. Dans ce cas, la démocratie serait le modèle à appliquer partout et toujours ? Hélas, dit Rousseau, la démocratie nécessite la réunion fréquente de ses membres, la connaissance de tous par chacun, et surtout de parfaits législateurs et gouvernants ("Il faudrait des dieux pour donner des lois aux hommes", or : "S'il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un gouvernement si parfait ne conviendrait pas à des hommes.")

Pourquoi cette distinction entre le souverain et le gouvernement ? Simplement parce que la volonté du souverain, justement, est indivisible, inaliénable, et ne saurait errer. Qu'elle concerne un point particulier et que la volonté n'est plus générale : elle touche un point indifférent à la totalité du corps social, dépend d'exécuteurs, est susceptible de critiques.

Du souverain et de la volonté générale découle immédiatement la loi, expression de celle-ci. La loi n'opprime pas, puisque l'oppression est toujours le fait de quelques-uns, et la loi émane de tous, pour tous. Si les individus réunis en souverain, ne peuvent errer, seuls, ils ne voient que leur intérêt immédiat, et la loi est là pour leur rappeler l'intérêt commun et, en fait, le leur aussi. La loi permet la liberté, qui la suit est libre... quitte à l'y forcer ! Il n'y a pas ici de contradiction.

Donc qui exercera la loi ? Qui peut remplir la pénible tâche d'exécuter les commandements de la volonté générale au détriment de l'intérêt individuel et de corps ? Tel est le problème du gouvernement. Le souverain lui délègue son pouvoir (le respect qu'on lui doit et sa force) mais doit être prêt à le lui enlever à tout moment. Il ne s'agit que d'une délégation; toute autre transmission rendrait caduc le pacte social, par l'aliénation du souverain.

La définition et le rôle du gouvernement sont donc particuliers à Rousseau. Le gouvernement est un corps intermédiaire entre le souverain et les sujets pour leur mutuelle correspondance, chargé de l'exécution

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