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Croire, Est-Ce renonCer à l'Usage De La Raison ?

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la foi et de la raison

1. Il faut reconnaître les limites de la raison humaine

Faut-il admettre comme allant de soi la contradiction entre la croyance et la raison ? Faut-il, autrement dit, poser comme une évidence que la raison ne peut que prouver l'absurdité de la foi, et que la foi réclame que nous abandonnions là toute rationalité ? Il revient à saint Thomas d'Aquin d'avoir voulu articuler ce que le sens commun oppose : la croyance religieuse ne réclame pas de nous l'ignorance, et la raison ne parle pas contre la Révélation. Rien, en effet, dans la religion révélée (c'est-à-dire dans la Bible comme parole de Dieu transmise aux hommes) ne vient contredire la raison : pour preuve, le théologien peut raisonner à partir des articles de foi − si la Révélation était absurde, une théologie rationnelle serait impossible, et tel n'est justement pas le cas. Cependant, si les articles de foi ne sont pas purement et simplement irrationnels, ils excèdent cependant les pouvoirs de compréhension de la raison humaine. Mais ce qui n'est pas intelligible pour nous n'est pas inintelligible en soi : si nous ne comprenons pas tout, la Révélation est pour Dieu l'évidence même. Mais si c'est Dieu lui-même qui a mis la raison en l'homme, la religion ne peut pas nous commander d'en suspendre l'usage : ce serait aller à l'encontre de la bonté des œuvres de Dieu. Le croyant doit donc faire usage de sa raison, tout en reconnaissant qu'elle est limitée et qu'elle ne peut pas tout comprendre.

2. Il faut démontrer autant que faire se peut les articles de la foi

Le croyant devra par conséquent chercher à démontrer ce qui est démontrable, et accepter que tout ne le soit pas, parce qu'il est un être fini et que son pouvoir de compréhension est également fini. Dans son infinie bonté, le Créateur nous a révélé dans le texte saint des vérités que nous n'aurions pas pu saisir par nos seules forces : pour saint Thomas d'Aquin donc, la foi éclaire la raison autant que la raison éclaire la foi. Ainsi, s'il reconnaît qu'il y a bien des « mystères de la foi », c'est-à-dire des propositions que notre raison ne peut démontrer, saint Thomas entend en revanche prouver l'existence de Dieu, par exemple en soutenant que tout ce qui est n'est que du possible, qui aurait pu ne pas être : il n'y a rien dans le monde, qui soit absolument nécessaire, parce que ce monde lui-même aurait pu ne pas être. Or le possible ne peut de lui-même passer au réel : il faut donc qu'il y ait un être nécessaire, qui soit cause de la réalisation du possible, c'est-à-dire de son passage à l'existence.

Saint Thomas donne ainsi cinq preuves différentes de l'existence de Dieu. La difficulté, c'est qu'elles reposent toutes, à des degrés divers, sur des présupposés eux-mêmes indémontrés ou sur des circularités logiques (par exemple ici : sur la présupposition que le monde aurait pu ne pas être). Peut-être doit-il en aller nécessairement ainsi de toutes les prétendues preuves de l'existence de Dieu ; mais alors, si cette existence est indémontrable, suffit-il d'affirmer que la raison humaine ne peut pas tout démontrer, et qu'il faut faire confiance à ce que la Révélation nous indique ? Que vaut cette révélation, en effet, si rien ne vient soutenir notre croyance en l'existence de son auteur ?

II. De l'impossibilité d'une preuve de l'existence de Dieu aux postulats de la raison

1. Toute preuve de l'existence de Dieu est impossible

Il revient à Kant, dans la Critique de la raison pure, d'avoir montré pourquoi aucune preuve de l'existence de Dieu ne pourrait jamais nous être donnée. Certes, je puis bien avoir un concept de Dieu ; mais je ne peux jamais déduire l'existence du seul concept − pour reprendre un exemple célèbre, le concept d'un billet de banque dans ma poche est exactement le même, que le billet y soit ou pas. Pour être assuré qu'un objet réel correspond à mon concept, que donc ce concept n'est pas une forme vide, il faut un contenu intuitif : seule la perception peut m'apporter la preuve qu'il existe bien quelque chose qui correspond dans le réel au concept que j'ai. Or, percevoir, c'est toujours et nécessairement percevoir dans le temps et dans l'espace (tous les objets perçus sont situés à un point de l'espace et du temps) ; mais Dieu, dans la définition même que j'en ai, est un être éternel (il est hors du temps) et ubiquitaire (il n'est d'aucun point de l'espace). Par définition donc, je ne pourrai jamais percevoir Dieu ; je n'aurai alors jamais de contenu intuitif pour remplir le concept que je possède. D'où la conclusion que Kant en tire : on peut certes penser à l'existence de Dieu, mais on ne pourra jamais la connaître, en d'autres termes on ne peut pas sans contradiction espérer en faire un objet de savoir. Nous ne pourrons jamais démontrer que Dieu existe − ou qu'il n'existe pas.

2. Refus de la position sceptique

Faut-il alors reconnaître que la croyance est dénuée de tout fondement rationnel, et que la raison doit nous contraindre à ne plus croire ? Non pas : la foi doit demeurer ce qu'elle est, un objet de croyance, elle ne doit pas prétendre être une science procédant par raisonnements et démonstrations. Du pur point de vue théorique donc, les grandes questions de la croyance religieuse (la foi en l'existence d'un Dieu, la foi en l'immortalité de l'âme) sont purement et simplement indécidables, et le demeureront à jamais. La croyance excède entièrement la raison, au sens où la raison est impuissante à prendre parti pour ou contre elle. On peut alors adopter une position sceptique, en affirmant que rien ne venant démontrer l'existence ou l'inexistence de Dieu, il serait plus sage de suspendre notre jugement, en reconnaissant que nous n'en savons rien et n'en pouvons rien savoir. Ce scepticisme suppose cependant que le seul usage possible de la raison, c'est la connaissance − en termes kantiens : que l'intérêt théorique fait le tout de l'intérêt de la raison. Or, ce que Kant va montrer, c'est justement que tel n'est pas le cas.

3. Les postulats de la raison pure pratique

En plus de l'intérêt théorique (qui se résume en une question : « Que puis-je savoir ? »), la raison est en effet animée d'un intérêt « pratique » (où la question devient : « Que dois-je faire ? »). Or ce que nous dit notre raison, c'est que nous

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